La République des cumulards
MALGRE SES PROMESSES de rupture, avec Nicolas Sarkozy, la monarchie
républicaine a encore de beaux jours devant elle. En catimini, une
règle non écrite imposée par Lionel Jospin demandant aux membres du
gouvernement de renoncer à tout mandat exécutif local est en train
dêtre effacée. Mais comment Nicolas Sarkozy pourrait-il demander à ses
ministres de faire ce quil na pas fait, lui qui a été à la fois
ministre et président du plus important Conseil général, celui des
Hauts-de-Seine ? Alors quen Allemagne, même les Parlements régionaux
découragent ces cumuls en les privant de leurs indemnités délu local,
en France on les justifie comme vient de le faire Alain Juppé avec
largument fallacieux dune synergie évidente qui enrichirait chacune des
deux fonctions. Le fameux sens des réalités ? Le contact avec les
vraies gens ? Pourquoi un député qui se consacrerait à ce seul mandat
perdrait-il contact avec le terrain ? Et à linverse comment dans la
même semaine, le même élu peut-il présider son conseil municipal,
signer les actes de la structure intercommunale qu'il préside,
participer aux travaux du conseil régional, tenir sa permanence
parlementaire, et monter à Paris pour assister aux séances, aux
réunions de groupe et de commissions ? Le cumul entraîne le cumul,
comme une boule-de-neige grossissant à mesure quelle descend de la
pente. Car la notoriété obtenue avec un mandat électif permet den
obtenir dautres, créant cette classe politique vieillissante,
masculine, accrochée à ses voitures de fonction et à ses privilèges.
Doù ces séances de lassemblée où une poignée de députés courent en tous
sens pour voter à la place leurs collègues absents. Un absentéisme qui
contribue à la dévalorisation de la démocratie dont une majorité de
Français estiment quelle ne fonctionne pas bien.