ministre et député, mandats incompatibles selon l'article 23 de la Constitutiton de 1958
Onze ministres du gouvernement formé par Nicolas Sarkozy vont se présenter aux élections législatives. Cest en quelque sorte leur devoir, selon le nouveau chef de lEtat. Nicolas Sarkozy a insisté pour que ces éminents représentants de lexécutif affrontent le suffrage universel. Lélu suprême du suffrage universel y voit une question de légitimité. En réalité, il sagit dune claque à la démocratie et à nos institutions. Lalinéa 3 de larticle 20 de la Constitution dispose en effet que les membres du gouvernement sont responsables devant le Parlement . Cest un des fondements de la séparation des pouvoirs.
Avec Nicolas Sarkozy, on passe à la vitesse supérieure des pratiques antidémocratiques qui sabordent les contre-pouvoirs. Voter aux législatives pour des ministres déjà en exercice revient en effet à voter pour leurs suppléants, qui seront dautant plus fidèles et attachés au gouvernement si jamais ils sont élus. Cela ne fait aucun doute. Non seulement Nicolas Sarkozy veut une majorité forte pour soutenir son action gouvernementale, mais il la souhaite muselée. Cest désormais très clair.
Rappelons par ailleurs que le président de la République ne remet pas en cause larticle 49.3 de la Constitution, qui permet à un gouvernement de passer en force sur un projet de loi, sauf si lAssemblée le renverse. Sarkozy a aussi annoncé quil y aurait une "pause dans la décentralisation". Ce qui veut dire quil ne veut pas laisser du pouvoir aux Régions et aux collectivités locales. Et le très centralisateur Premier ministre François Fillon sera aux ordres. Avec des godillots à lAssemblée nationale, aucun risque de voir cette logique remise en question ou même simplement critiquée.
On entend déjà les justifications de lEtat UMP sur la nécessité dune majorité stable pour appuyer laction dun gouvernement uni derrière un président dignement et largement élu. Cest incontestable : pour avancer des projets, il faut une majorité qui tranche. Mais le débat et le pluralisme, eux aussi, servent laction du gouvernement. Et ils sont nécessaires à la démocratie.
Une dernière réflexion. Imaginons un instant que Nicolas Sarkozy, après avoir concentré tous les pouvoirs, déclare une maladie génétique inconnue qui le fasse délirer et faire nimporte quoi. Sera-t-il encore temps de débattre et déviter des pratiques dangereuses pour la démocratie ?